OCHOSI
Il a été très simple de trouver le sujet de ce texte. Mes précédentes expressions ont évoqué Eshu le farceur cosmique et Ogun le forgeron protecteur. Ces deux forces primordiales s’inscrivent dans une trinité de guerriers qui sont les tous premiers supports de méditation dans l’animisme. Il était évident que je devais évoquer maintenant le troisième guerrier. Le sujet est clair. Pour autant je ne sais absolument pas ce que je vais en dire.
C’est le grand vide. Je n’imagine pas parler d’autre chose. Et je n’arrive pas à appréhender cette énergie qui souhaite s’exprimer. Pour certaines raisons que j’évoquerai peut-être par ailleurs, j’ai une affinité particulière avec ce Loa. Un immense respect. Tout ce que je pourrais en dire me parait fade, sans saveur.
Je patiente. J’attends. Je respire. Je sais que je ne renoncerai pas. Je me concentre et tente différents angles d’approche. Je vaque à mes activités du quotidien en maintenant une certaine présence sur mon sujet. Je me focalise et patiente encore. Encore. J’écoute. De plus en plus subtil. Je ressens.
Et puis je me rends compte que je suis dans l’état d’esprit même que transmets l’énergie de ce guerrier. C’est Ochosi. Le maitre chasseur et son arc fidèle. Sa cible est précise. Sa patience est légendaire. Il n’a pas son pareil pour se concentrer, suivre les traces, écouter son environnement, viser, attendre le bon moment pour décocher son tir qui n’a que peu de chance de rater.
La flèche part. Elle n’a pas raté. Je suis touché en plein cœur. Je comprends. Pour Ochosi, le vide n’existe pas. La forêt est immense et la nourriture innombrable. Par la présence, le silence et l’écoute, l’abondance se révèle totale.
J’ai beaucoup apprécié quand mon enseignant m’a parlé de la vacuité des formes et des phénomènes. Cette notion évoquait pour lui le vide, comme un aquarium rempli de rien et n’inspirant qu’ennui mortel. Lorsqu’il a remplacé ce mot vacuité par espace, alors cette immensité s’est révélé plénitude. Un aquarium rempli de liquide, d’algues, de poissons, de planètes, de galaxie, d’émotions, de sensations et de félicité qui évoluent dans cet espace.
Comme me le répète très souvent mon père spirituel qui incarne si bien ce chasseur cosmique, la meilleure façon d’avoir ce qu’on veut, c’est de vouloir ce qu’on a. J’ai dit qu’il me le répétait souvent alors je répète aussi. La meilleure façon d’avoir ce qu’on veut, c’est de vouloir ce qu’on a. Réaliser tout ce qui est déjà là, partout autour ou à l’intérieur de nous, au-delà des illusions de manque et de toute sortes d’histoire qu’on se raconte par manque de présence et d’écoute.
La flèche est partie. D’un coup je me retrouve avec pleins de choses à dire. D’un coup je me retrouve à avoir dit pleins de choses.
Chaque Loa a une multitude d’aspect. J’ai choisi de décrire Eshu sous l’angle de la porte et du chemin. Ogun sous l’aspect du sacrifice. Il y aurait pleins d’aspects différents à exprimer. Pleins de façons différente d’exprimer le même aspect.
Ochosi est un maitre de l’abondance. Il sait comment trouver la nourriture dans les bois. Avec lui, je sais que je ne manquerai jamais de quoi raconter, pour peu que je porte suffisamment d’attention au bon endroit.
Ëtes-vous déjà allé vous promener avec quelqu’un qui connait bien la forêt et les plantes sauvages ? Un tel guide nous montre que la nourriture est partout. Le chemin sur lequel je suis passé tant de fois en n’y voyant que mauvaises herbes et friches stériles, se révèle fourmiller de salades savoureuses et de nutriments délicieux.
J’ai hâte de vous raconter la suite de mes aventures de chasse dans les bois de mon imagination. Je vais prendre soin de cuisiner toutes ces victuailles artistiques aux petits oignons que j’espère vous apprécierez. Et avec la magie de la technologie, il y en a pour tout le monde, sans limite !
Eshu, Ogun et Ochosi sont des fondations profondes. Ces guerriers nous offrent un soutien des plus solides. Me voilà bien équipé pour partir à l’attaque de l’écriture et de la création.