Les ancêtres
Ce rêve d’Ogun m’a fait un bien fou ! Je dis souvent, lorsque l’énergie est difficile à gérer, qu’elle réveille une tension, une douleur ou une émotion, c’est qu’elle s’accumule dans une zone trop restreinte du corps. Elle se retrouve comme une cocotte-minute dont la vie ne tient qu’à une minuscule soupape.
C’est comme si on essayait de soulever un kilo avec le petit doigt. C’est très difficile ou impossible, et ça fait mal. La tentation est grande de renoncer. De refouler. D’abandonner. De laisser le mental se saisir et inventer toutes sortes d’histoire. Mais quand on implique tout le corps, tout le souffle, tout notre être pour soulever ce kilo, cela devient très facile.
Ogun est cette force et cette audace de poursuivre. L’engagement. L’expansion. La continuité. Il vient déloger les obstacles qui se dressent sur le chemin de l’énergie. Parfois avec une machette. Ou un bazooka. Ou comme cela s’est présenté pour moi avec un fusil de sniper.
La voie est maintenant libre. L’intensité n’a pas diminué. Elle s’est répartie dans un espace plus grand. Je me sens beaucoup plus calme. Apaisé. Présent et silencieux. Je me sens d’attaque pour aborder un sujet que j’adore et si cher à l’animisme. Les ancêtres.
A l’intérieur, ce n’est plus bouillonnant ou explosif. Ça coule. Ça circule. J’ai envie de vous parler de pleins de choses sur les ancêtres. Je me sens comme un petit enfant qui rencontre un nouvel ami et qui veut lui montrer tous ses jouets. Je pourrais parler de ci ou ça. Evoquer tel rêve ou tel autre. Parler de tel enseignement de mes maitres.
Une pensée me traverse. Quel pourrait être le prochain sujet ? Non je ne veux pas y penser, je dois me concentrer sur le sujet du jour.
Trop tard ! Le prochain sujet se manifeste. Je ressens sa présence majestueuse. Des formes et des mots me viennent pour en parler.
Et je veux encore moins penser au sujet d’après. Encore trop tard ! Cette présence est très inspirante aussi. J’entrevois ce qu’elle me prépare.
Toute cette énergie coule vite. Le monde des loas est beaucoup plus rapide que celui de la matière. La rivière coule comme un impétueux torrent des montagnes. Alors je me pose sur la berge de mon sujet du jour pour m’y rafraichir les pieds. Le corps entier.
Je ne me laisse pas emporter par le courant. Je maintiens ma présence sur les ancêtres. Je respire. J’écoute. Je vis. Je porte mon attention comme me l’a appris mon père spirituel sur le point de rencontre entre le monde des Loas et celui des formes. Je me laisse entrer dans cette présence dans le sommeil. Je rêve.
Je suis dans une communauté, comme un village entouré par la jungle. De la jungle s’invite un Lynx. Tout le monde reste calme mais surveille d’un œil l’animal sauvage. Les villageois respectent l’animal. Il montre ses griffes. Il caresse griffe ouverte la tête d’un enfant avec respect sans le blesser. Il repart dans la jungle.
Un lionceau sort de la jungle et vient se présenter dans le village. Cette fois il se dirige vers moi. Il montre ses dents, me mord la main, et reste accroché à ma main. Je parle gentiment avec le lionceau, l’amène avec tendresse à lâcher prise.
Je suis avec mon frère qui me parle d’une problématique. J’évoque les Loas. Il le reçoit comme une évidence et me dit qu’il va faire appel à eux pour sa problématique. Je lui dis, pas « les » Loas. C’est très important de porter son attention sur un seul à la fois. Il réfléchit et évoque différentes forces. Mawu le Loa du soleil et de la lune. Eshu. Les Bulukus… Je lui dis que le tout premier Loa à évoquer est Eshu. Il me répond l’adorer, que c’est exactement celui qu’il doit méditer. Il me rapporte une représentation d’Eshu, similaire à celle que j’ai réalisé dans le monde matériel et dont j’ai déjà parlé. Dans le rêve, j’ai donné cette représentation à mon frère. J’en ai aussi une que je lui montre. Elles sont comme jumelles, identique. Il y en a une troisième au mur, similaire, beaucoup plus grosse.
On se retrouve avec mon frère et mon père dans une voiture. On sort de la route et on semble comme voler au-dessus des plaines. J’ai l’impression qu’on va s’écraser à tout moment mais cela n’arrive pas.
Je suis dans une ville, je marche avec ma compagne dans les rues. Une femme nous suit. Son nez semble couler et elle renifle avec discrétion. Je ne la connais pas mais lui donne un mouchoir. Elle commence alors à me parler de yoga dans la lignée du kriya. Nous arrivons devant un bâtiment. De l’extérieur, rien ne le distingue. Pourtant, je vois à l’intérieur une statue caractéristique. La femme regarde mais ne voit pas. Il y a des angles, des colonnes, des portes. Je l’oriente, la mets dans la bonne direction pour qu’elle aperçoive la statue de Lahiri Mahasaya, ce maitre légendaire de la lignée du Kriya. Elle le reconnait et entre dans le temple, pleine de joie, nous y entrons aussi.
Dans le temple, j’y retrouve des amis, et des maitres de la lignée. Nous pratiquons le yoga, celui de la présence et de la joie.
Je vois mon maitre. Il me reconnait et me salue, nous nous prenons les mains. Il s’éloigne sans me lâcher des yeux. Nous échangeons avec le regard, avec des gestes et des mots. Je garde pour moi cet échange car je ne suis pas capable de retranscrire avec des lettres cette expression si décalée et cet amour si puissant que me transmet cet enseignant merveilleux dans les rêves.
Je suis conscient de rêver. Je m’envole depuis une colline d’où je vois le temple. Je m’élève très haut dans les airs. De là je perçois le temple comme un immense et très beau château. Je continue de voler.
Lorsque je me réveille de ces aventures, je prends le temps de me remémorer et noter dans mon carnet les phrases clés. J’avoue qu’il est rare maintenant que je note mes rêves à l’écrit. Il y a moins de détail que ce que je rapportais auparavant.
Quand j’ai passé du temps avec mon père spirituel, il m’a transmis dans tous les domaines de la vie. Beaucoup de cette transmission se faisait par la simple présence et la vie ensemble. Et parfois il me donnait des perles à méditer. Comme une graine, une phrase très courte qui contient tout un arbre. Il ne tient qu’à moi d’arroser ces graines spirituelles. Ces phrases me reviennent des mois après, avec un tout nouveau sens, une toute nouvelle profondeur. J’ai l’impression qu’il n’y a pas de limite aux fruits que peuvent donner ces graines.
Une de ces graines est que la famille et les ancêtres sont deux choses différentes. La famille fait partie des ancêtres mais les ancêtres sont plus larges que la famille.
Quant à mon enseignant en yoga, son maitre lui disait que sans la lignée, toute pratique est vaine.
Les ancêtres sont de même nature que les Loas. Au-delà des formes. J’espère que ce récit de rêve vous permet d’entrevoir et de toucher à ce qui m’anime sur ce sujet des ancêtres. Bien sûr je suis animé par les membres de ma famille. Et puis je suis animé par les grands ancêtres de l’humanité, avec qui j’ai de fortes affinités et qui constituent mes lignées spirituelles.
Quant à Eshu, un autre de ses aspects, c’est d’être le messager entre les mondes. C’est lui qui permet toute communication avec les ancêtres ou les loas. Sa représentation est comme une porte ou un chemin. Trouver cette porte dans les rêves ouvre à de nombreuses nouvelles dimensions !
J’ai beaucoup de gratitude pour votre lecture, tous vos merveilleux retours et vos commentaires. Merci beaucoup à toutes et à tous !